Bonjour à toutes et à tous,

 

Ce billet est plus particulièrement destiné à celles et ceux  qui, à partir du 17 octobre 2020 vont faire un grand saut dans le passé et vivre les joies du couvre-feu. Mais que les autres se sentent aussi concernés. Pour vous convaincre tous d’occuper vos longues soirées d’automne avec un roman hors du commun, je fais ici allusion, bien sûr à Chocolats !, je vous livre quelques informations sur un personnage-clé du roman : le père Finet, qui défraie la chronique des pères catholiques pédophiles. 






 

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Quand j’entrepris l’écriture de Chocolats !, un des personnages centraux de l’entourage familial est rapidement devenu le Père George Finet. Ma grand-mère se rapprocha de lui en 1938 lors de la maladie de mon grand-père (cancer du pylore). La rencontre fut vraisemblablement due au fait que le chirurgien d’Albéric Guironnet était le professeur Ricard, spécialiste du traitement de ce type de cancer. Or le professeur André Ricard était le beau-frère du Père Finet : il avait épousé Geneviève Marie Josèphe Jeanne Finet en 1924.

 

Le Père Finet avait tout pour être rassurant. Né en 1898 dans une famille de la grande bourgeoisie lyonnaise, son parcours spirituel fut un sans faute :

 

·     il fit ses études aux Chartreux ;

·     fut frappé par la vocationlors d'une retraite à Ars (1914) ;

·     fit le voyage pour Rome l’année suivante ; au cours d’un visite à Saint-Louis-des-Français, il s’identifia au Matthieu du tryptique du Caravage, particulièrement La Vocation de Saint Matthieuoù l'on voit Jésus tendre la main vers le futur Saint ;

·     revint de Rome pour satisfaire à ses obligations militaires : il est mobilisé dans l’artillerie. De ce petit séjour sur le terrain, il reste, paraît-il, une émouvante photographie qui montre le jeune Georges en train d’éplucher des pommes de terre ;

·     entra au Séminaire français de Rome, tenu alors par les jésuites ;

·     fut ordonné prêtre en la chapelle des Chartreux en 1923 ; 

·     fut vicaire à Oullins puis à la primatiale Saint-Jean de Lyon puis nommé sous-directeur de l'enseignement libre.

 

Les portraits qu’on peut lire ici ou là du Père Finet évoquent un homme d’une profonde spiritualité, proche des humbles, aux idéaux élevés. Il est plus rarement ajouté un côté « salonard » qui incite à la prudence. « L’homme est massif au physique autant que de nature ardente. C’est un roc tout en rondeur. Un passionné. Georges Finet possède ce mélange de courage et d’optimisme qui forge l’ambition et le goût du défi. (…) Le P. Finet est un orateur-né, doublé d’un séducteur, ce qui donne un grand communicateur. Rares sont ceux qui ne sont pas tombés sous le charme de sa parole. L’homme et le prêtre fascine et subjugue » (François de Muizon, Marthe Robin, le mystère décrypté2011, pages 127 et 177).  Le philosophe Paul-Louis Couchoud le décrit comme une brasseur d’affaires. (cité par F. de Muizon, op. cit, p. 170) 

 

Ces qualités et défauts allaient s’exprimer pleinement en 1936 lors de sa rencontre avec Marthe Robin, paysanne des environs de Valence (Chateuneuf-de-Galore) portant stigmates ; paralysée dès le début des années 1920 (totalement, selon le Père Finet ;  avec des rémissions, selon plusieurs médecins et témoins oculaires) ; et, depuis 1931, frappée d’inédie (abstention totale de nourriture et de boisson) et d’agrypnie (perte totale prolongée du sommeil). Elle parle régulièrement avec la Sainte Vierge ainsi qu’avec Sainte Thérèse de Lisieux (mais son caractère notoirement exalté ainsi que sa mémoire approximative pourraient faire de ces causeries le fruit de rêveries). Elle est dotée de nombreux dons paranormaux (et inexplicables, par définition). A partir de 1939, sa vue baisse : elle sera bientôt aveugle. Bref, il s’agit d’une personnalité trouble, ambiguë, qui souffre placidement le martyre, séduit au-delà du raisonnable les uns et interloque les autres.

 

Sur cette future sainte, dit-il sans hésitation, avec tous les maux et mystères qui l’entourent, Georges Finet allait bâtir sa fortune : à partir de l’École pour enfants et jeunes filles créée à l’initiative de Marthe en 1934 (qui s’avèra être une leveuse de fonds de premier ordre) dans le château avoisinant reconverti en boite de nuit, Georges va créer une véritable chaine de lieux de retraite : les « Foyers de Charité » (il connurent un succès rapide avec l’appui du Vatican et de ses nombreux mécènes croyants et crédules. Il existe aujourd’hui plus de 80 Foyers à travers le monde : c’est un des aspects brasseur d’affaires de notre homme). Et ceci, avec l‘aide de son beau-frère, le professeur Ricard évoqué plus haut. En effet, le professeur Ricard acquit les terres pour sécuriser l’École pour enfants et jeunes filles, et aussi lieu de retraite (il y créa le premier Foyer de Charité pour y prêcher des retraites de cinq jours en silence). Et surtout, c’est le professeur Ricard qui, avec Jean Dechaume, psychiatre, lui aussi familier de Châteuneuf-de-Galaure, rédigea en 1942 un rapport d’expertise médicale peu scientifique, mais conforme à la vision mystique défendue par Georges Finet. 

 

D’autres, et ils sont nombreux, accumulent les preuves réelles établissant que la mystique pourrait bien être une mystificatrice. Mon opinion est intermédiaire. L’ordonnateur de cette mise en scène est le Père Finet, et Marthe Robin, plutôt que de vouloir abuser le monde, était sous l’emprise du père. Une preuve de ma thèse réside dans le fait que nombre de ses écrits se sont avérés être des plagiats d’auteurs qu’il serait plus qu’étonnant que Marthe Robin connût : Catherine de Sienne († 1380), Thérèse d’Avila († 1582), Jean de  la  Croix (†1591), Pierre de Bérulle  († 1629), Thérèse de Lisieux († 1897), Mechtilde d’Hackeborn († 1298), Gertrude d’Helfta († 1301), Véronique Giuliani († 1727), Anne-Catherine Emmerich († 1824), Élisabeth de la Trinité († 1906) ainsi que d’un dizaine d’auteurs du XXème siècle (Source : F. de Muizon, op. cit.). Un livre récent (La fraude mystique de Marthe RobinConrad de Meester, 2020) confirme cette thèse. De là à penser que les écrits de Marthe Robin sont des «adaptations » plus qu’orientées de ses propos par le Père Finet, il n’y a qu’un pas que le romancier, bien sûr, franchit allègrement. 

 

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Après avoir consulté une quantité assez importante d’ouvrages et articles portant sur Marthe Robin (ce qui, je vous l'assure, est d'un ennui mortel), l’ouvrage écrit par François de Muizon (paru en 2011) m’est apparu le moins pénible à lire, le plus fiable, et surtout, le mieux compatible avec ce qu’il m’a été permis d’établir lors de la reconstitution de l’histoire de la Chocolaterie familiale - surtout la mort d’Albéric Guironnet, ainsi que le destin malheureux de la fortune familiale.

 

Évidemment, en effectuant mes recherches, le portrait que je me fis de ce « bon père » ne collait pas vraiment à celui de la littérature dominante. Ce portrait est sorti de la plume d’un prétendant romancier… dans lequel le père Finet apparaît comme un ecclésiastique urbain, qui aime fréquenter la bonne bourgeoisie lyonnaise (dont la famille Neyron de Champollon), est amateur de bon vin, et bien sûr, se mêle de finances douteuses. Le rôle que j’attribue au Père Finet dans la spoliation de la famille Neyron, la famille Guironnet et une vingtaine d’autres (y compris des congrégations religieuses) est peut-être excessif mais il paraît plus que probable qu’il a été un des intermédiaires ecclésiastiques dans l’animation des réseaux financiers du Vatican, lors de la création de l’IOR et après : à quel niveau de responsabilité ? je ne sais. 

 

Son goût pour les jeunes filles m’a, dès l’origine de mes travaux, paru suspect. J’en eu la confirmation en septembre 2019 quand parurent les premiers articles de presse à propos de dénonciations pour « comportement inapproprié » vis à vis des jeunes filles du lycée de Châteauneuf-de-Galaure. Et les détails contenus dans le rapport de la  Commission de recherches pluridisciplinaire sur l’abbé Georges Finet ne laissent guère de doute. 

 

Chose certaine, en débutant l’écriture de ce livre, je ne m’attendais à ce que l’actualité contribuât à ce point à alimenter mon roman : ce faiseur de sainte et spoliateur de quelques fortunes lyonnaises serait ainsi un pédophile-contrefacteur… Parfois la réalité dépasse la fiction, et l’étonnement est démultiplié quand le roman est en cours d’écriture. 

 

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